Doiton considĂ©rer la religion comme ennemie de la raison ? Sujet 2154 Doit-on opposer raison et sensible ? Sujet 5873 Doit-on souhaiter la dictature de la raison ? Sujet 396 Doit-on tout soumettre Ă  la raison ? Sujet 101439 Education, humanisme et raison Sujet 2556 En quel sens la raison peut-elle se mettre au service de la religion ? Sujet 161 En quel sens la science instruit-elle la LadĂ©marche de l’intervenant, Thomas Adam Garnung, diplĂŽmĂ© de philosophie, d’arts plastiques, metteur en scĂšne et professeur de théùtre, consiste Ă  favoriser la participation et le cheminement personnel par l’échange et le dĂ©bat dans le prolongement des NNP, nouvelles pratiques de la philosophie. L’homme peut-il se passer de Voirplus de contenu de L'Homme peut-il se passer de la religion? sur Facebook. Se connecter. Informations de compte oubliĂ©es ? ou. CrĂ©er nouveau compte. Plus tard. Publications des Lebut de cette contribution est de diriger l’attention sur les implications philosophiques de la priĂšre. Si la priĂšre n’est pas dĂ©pourvue de sens c’est qu’elle suppose, d’un cĂŽtĂ©, l’idĂ©e de la personnalitĂ© de Dieu et, de l’autre, son immuabilitĂ©. En s’appuyant sur MaĂźtre Eckhart, on peut dĂ©fendre l’idĂ©e que mĂȘme la supplication n’est pas incompatible avec le Lhomme peut-il se passer de religion ? Ainsi je suis en contradiction avec vous lorsque, poursuivant vos dĂ©ductions, vous dites que l'homme ne saurait absolument pas se passer de la consolation que lui apporte l'illusion religieuse, que, sans elle, il ne supporterait pas le poids de la vie, la rĂ©alitĂ© cruelle. Vay Tiền Nhanh Chỉ Cáș§n Cmnd. Dissertation L’homme peut-il Ă©chapper au temps ? DĂ©finir les termes du sujet L’homme peut-il Peut-on ? » exprime la possibilitĂ© avons-nous les moyens, sommes-nous capables d’échapper au temps ? Le temps Le temps dĂ©signe l’ensemble des dimensions temporelles le passĂ©, le prĂ©sent et l’avenir. Pourtant, si cette dĂ©finition semble simple, elle n’en est pas vraiment une le passĂ© n’existe que par notre mĂ©moire, le prĂ©sent par notre attention et l’avenir par notre imagination. Le temps n’est donc que ce produit de notre activitĂ© intellectuelle, qui peut ainsi percevoir le changement, preuve manifeste du passage du temps. Échapper au temps Échapper au temps peut signifier se soustraire au passage du temps, donc ĂȘtre immortel. Cela pourrait Ă©galement signifier lutter contre le passage du temps en essayant de se soustraire Ă  ses effets ou en crĂ©ant des choses qui rĂ©sistent Ă  son passage. Enfin, il pourrait s’agir d’échapper Ă  l’idĂ©e que nous allons mourir ou de fuir la tristesse liĂ©e Ă  l’idĂ©e de la mort. DĂ©gager la problĂ©matique Construire un plan Les titres en couleurs et les indications entre crochets servent Ă  guider la lecture et ne doivent en aucun cas figurer sur la copie. Introduction [Reformulation du sujet] Se demander si l’on peut Ă©chapper au temps, c’est se demander si nous lui sommes nĂ©cessairement soumis. A priori, on pourrait penser que nous ne pouvons pas nous soustraire Ă  ce qui dĂ©finit notre existence. [DĂ©finition des termes du sujet] Le temps dĂ©signe Ă  la fois le passĂ©, le prĂ©sent et l’avenir, auxquels nous nous rapportons respectivement par notre mĂ©moire, notre attention, notre imagination. En ce sens, on peut dire que nous sommes doublement temporels si nous sommes, en tant que mortels, dĂ©finis par le temps, il est aussi le produit de notre activitĂ© intellectuelle. Mais alors, que signifierait Ă©chapper au temps ? Se soustraire au passage du temps serait d’abord ĂȘtre immortel ou rĂ©sister Ă  son passage, en crĂ©ant des choses qui lui rĂ©sistent. [ProblĂ©matique] Mais si nous sommes victimes du temps, n’est-ce pas dans la mesure oĂč, quoi que nous fassions, il s’inscrit en nous par l’idĂ©e que nous allons mourir ? Tout le problĂšme est de savoir si l’homme a les moyens d’échapper Ă  ce qu’il est. Nous cherchons Ă  Ă©chapper Ă  ce qui nous nuit mais en quoi le temps serait-il mauvais pour nous ? [Annonce du plan] Nous verrons tout d’abord qu’il nous est impossible d’échapper au temps dans la mesure oĂč il dĂ©finit notre existence. Mais n’avons-nous pas le pouvoir de rĂ©sister Ă  ce temps qui semble s’écouler indĂ©pendamment de nous ? Enfin, nous examinerons dans quelle mesure nous pouvons Ă©chapper au temps ou plutĂŽt Ă  ce par quoi il nous fait souffrir, c’est-Ă -dire Ă  l’idĂ©e qu’il nous condamne Ă  la mort. 1. On ne peut pas Ă©chapper au temps A. Nous sommes mortels Dans un premier temps, on pourrait penser que nous sommes les proies du temps en ce qu’il donne sa forme et sa limite Ă  notre existence. Le temps s’imprime en nous sous la forme de la croissance et du vieillissement, qui nous indique que nous allons mourir la mortalitĂ© est bien ce qui dĂ©finit toute existence. Le temps fait donc partie de nous et il serait en ce sens absurde de croire que nous pouvons sortir de lui et fuir ses effets destructeurs. Cette croyance peut tout au plus prendre la forme du fantasme de l’immortalitĂ© on peut rĂȘver prendre le contrĂŽle du temps, se promener en lui, inverser son cours, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un rĂȘve. Dans la Lettre Ă  MĂ©nĂ©cĂ©e, Épicure fait ainsi du dĂ©sir d’immortalitĂ© le pire des dĂ©sirs vides, Ă  savoir ces dĂ©sirs qu’il est impossible de satisfaire et qui en cela nous vouent au malheur et Ă  l’excĂšs. Effacer les signes du vieillissement, par exemple, n’est pas Ă©chapper au temps mais se livrer Ă  lui par la souffrance d’un combat perdu d’avance. B. Nous sommes des ĂȘtres temporels qui faisons exister le temps C’est que le temps s’imprime en nous doublement si nous ne pouvons pas Ă©chapper Ă  ce que nous sommes, c’est-Ă -dire des vivants promis Ă  la mort, nous ne pouvons pas non plus Ă©chapper Ă  la tristesse liĂ©e Ă  l’idĂ©e du temps qui passe. Mortels, nous sommes Ă©galement liĂ©s au temps par notre mĂ©moire, notre attention et notre imagination, qui font que nous avons l’idĂ©e du temps, et que cette idĂ©e est celle d’une chose dont, comme le souligne saint Augustin, tout l’ĂȘtre est de passer. Face Ă  cet adversaire insaisissable, nous ne pouvons qu’envier l’insouciance de la vie animale qui se trouve allĂ©gĂ©e du poids du temps inscrit en l’homme par le dĂ©veloppement mĂȘme de ses facultĂ©s intellectuelles. C’est le sens de l’analyse nietzschĂ©enne de l’oubli si la mĂ©moire qui nous rapporte au passĂ© est ce qui rend possible la connaissance, elle est aussi ce qui nous fait souffrir en ce qu’elle nous rapporte Ă  tout ce que nous avons perdu. Or, l’homme est dĂ©fini par sa mĂ©moire et son imagination Ă©chapper au temps, ce serait apprendre l’oubli » pour se dĂ©faire du fardeau du passĂ© qui nous empĂȘche de vivre. [Transition] Pourtant, s’il est impossible de se soustraire au passage du temps ou de nous dĂ©faire de ces qualitĂ©s intellectuelles qui nous le rendent sensible, toute lutte contre le temps est-elle vaine ? Si on ne peut sortir du temps, ne peut-on du moins lui rĂ©sister ? 2. On peut rĂ©sister au passage du temps A. Il est possible de lutter contre le temps Dans un second temps, on peut penser qu’échapper au temps serait en rĂ©alitĂ© crĂ©er dans le temps des points de rĂ©sistance. Le dĂ©sir d’immortalitĂ© » condamnĂ© par Épicure n’est-il qu’un dĂ©sir vide, source de souffrance, ou n’y a-t-il pas une positivitĂ© de ce dĂ©sir en ce qu’il nous pousse Ă  dĂ©passer les limites de notre existence humaine ? Lutter contre le temps serait dĂšs lors la seule façon de lui Ă©chapper, et s’il n’est pas possible de sortir du temps, il est pourtant possible de s’opposer Ă  son passage. Si nous ne pouvons pas empĂȘcher le temps de passer, nous pouvons pourtant crĂ©er des choses sur lequel le temps n’aura pas de prise. B. Il est possible de crĂ©er de l’immortalitĂ© C’est en particulier le sens de l’analyse par Hannah Arendt de l’Ɠuvre d’art la spĂ©cificitĂ© de cette Ɠuvre, parmi tous les objets du monde, rĂ©side prĂ©cisĂ©ment dans son rapport au temps. Ni produits de consommation » ou produits de l’action » inscrits de façon prĂ©caire dans le temps, ni objets d’usage » usĂ©s par le temps ; les Ɠuvres d’art, dit-elle, sont les seules crĂ©ations humaines qui accĂšdent Ă  une immortalitĂ© potentielle ». DĂ©fis humains adressĂ©s au passage du temps, les Ɠuvres d’art ne sont pas fabriquĂ©es pour les hommes, Ă©crit la philosophe, mais pour le monde, qui est destinĂ© Ă  survivre Ă  la vie limitĂ©e des mortels, au va-et-vient des gĂ©nĂ©rations ». Autrement dit, l’Ɠuvre d’art est bien un point fixe par lequel l’homme s’échappe du temps qui s’inscrit en lui par sa vie biologique. Par l’art, l’homme est capable de crĂ©er des objets qui rĂ©sistent Ă  l’action corruptrice du temps. [Transition] Pourtant, crĂ©er des points de rĂ©sistance au passage du temps est-il notre seule façon d’échapper au temps ? Ce qui nous pĂšse, n’est-ce pas avant tout l’idĂ©e que nous allons mourir, et nos Ɠuvres d’art nous en empĂȘchent-elles ? 3. On peut Ă©chapper Ă  l’idĂ©e que le temps nous condamne A. On peut fuir l’idĂ©e de notre propre mort En rĂ©alitĂ©, nous sommes d’abord victimes du temps dans la mesure oĂč penser le temps, c’est avoir l’idĂ©e de sa propre mort. Mais si nous sommes impuissants Ă  Ă©chapper Ă  la mort, n’avons-nous pas le pouvoir d’échapper Ă  la souffrance liĂ©e Ă  l’idĂ©e que nous allons mourir ? C’est le sens de l’analyse de Pascal, qui dans les PensĂ©es Ă©voque le divertissement comme le pis-aller trouvĂ© par l’homme pour fuir l’idĂ©e qu’il va mourir. Se divertir permettrait ainsi de passer le temps pour oublier que nous allons mourir, et s’il n’y a que l’idĂ©e de dieu pour donner un sens Ă  notre existence de mortels, nous avons toujours la possibilitĂ©, dit-il, de nous absorber dans cette fuite du temps et de nous-mĂȘmes qui n’est que la marque de notre misĂšre humaine. B. On peut renverser l’idĂ©e triste de la mort en une idĂ©e qui nous rappelle au souci de vivre Mais le temps nous condamne-t-il vraiment ? En rĂ©alitĂ©, on pourrait en conclure qu’échapper au temps serait Ă©chapper Ă  la tristesse produite par l’idĂ©e que nous allons mourir. Mais comment Ă©chapper Ă  cette tristesse ? Dans la Lettre Ă  MĂ©nĂ©cĂ©e, Épicure nous explique comment se dĂ©livrer de la crainte de la mort qui nous empĂȘche de vivre. La mort, dit-il, est un phĂ©nomĂšne physique et une rĂ©alitĂ© que nous ne rencontrerons jamais, puisque nous sommes, en tant que vivants, le contraire d’elle. En ce sens, l’idĂ©e de la mort n’est pas Ă  fuir ce qu’il faut combattre, c’est la tristesse qui lui est liĂ©e, et nous ne pouvons la combattre qu’en nous appuyant sur l’idĂ©e vraie de la mort, qui nous rappelle Ă  l’urgence de bien vivre. Conclusion En dĂ©finitive, s’il est impossible de ne pas mourir, il est bien en notre pouvoir d’échapper au temps en nous dĂ©livrant de la souffrance et de l’impuissance produites par l’idĂ©e que le temps nous condamne Ă  la mort. Échapper au temps serait alors se libĂ©rer de la tristesse et regarder en face l’idĂ©e de notre propre mort pour profiter de ce temps qui nous est comptĂ©. France mĂ©tropolitaine ‱ Septembre 2011 dissertation ‱ SĂ©rie L La science peut-elle faire disparaĂźtre la religion ? Les clĂ©s du sujet DĂ©finir les termes du sujet La science Au sens large, le mot dĂ©signe un savoir. De façon plus prĂ©cise, c'est un savoir fondĂ©, dĂ©montrĂ©, qui ne varie donc pas avec les circonstances. Science s'oppose ainsi Ă  opinion. La connaissance scientifique moderne implique l'idĂ©e d'expĂ©rimentation. La religion C'est une pratique collective structurĂ©e par des rites, des cultes, par lesquels une communautĂ© de croyants affirme ĂȘtre liĂ©e Ă  un ou plusieurs dieux garants de l'ordre et de la justice. Sur le plan subjectif, chaque membre du groupe est animĂ© par une foi dans l'existence et la bienfaisance de ces divinitĂ©s. Faire disparaĂźtre Cette expression sous-entend la prĂ©sence d'un processus. La science est-elle une dĂ©marche conquĂ©rante qui, dans son parcours, chasse la religion des domaines qu'elle occupait ? Le verbe pouvoir Il a ici d'abord le sens de la possibilitĂ© la science a-t-elle les moyens de provoquer la disparition de la religion ? Un deuxiĂšme sens, celui de la lĂ©gitimitĂ©, apparaĂźtra aussi. DĂ©gager la problĂ©matique et construire un plan La problĂ©matique Science et religion ont eu, et ont encore parfois, des relations conflictuelles comme si toute avancĂ©e de la premiĂšre signifiait un recul de la seconde. Il faut donc qu'elles aient une prĂ©tention commune. Quelle est-elle et devons-nous penser que leurs relations soient telles que les avancĂ©es de l'une chassent l'autre ? Le plan Dans un premier temps, nous verrons les prĂ©supposĂ©s expliquant l'existence d'un conflit. Puis, nous aborderons les grands thĂšmes de la critique de la religion. Enfin, nous nous demanderons si la prĂ©tention scientifique Ă  faire disparaĂźtre la religion ne rĂ©vĂšle pas une mĂ©connaissance par la science des limites de son domaine. Éviter les erreurs Faire une copie simplificatrice en faveur d'une des deux notions. CorrigĂ© Introduction Il est courant d'entendre opposer la science et la religion. Nous avons le sentiment que chaque avancĂ©e de l'explication scientifique se traduit par un recul des croyances religieuses. Des raisons existent Ă  cela. L'Europe a Ă©tĂ© marquĂ©e par des conflits retentissants entre ces deux modes de pensĂ©e, comme en tĂ©moigne la condamnation de GalilĂ©e, et l'Ă©poque des LumiĂšres a estimĂ© que la religion Ă©tait une superstition qui disparaĂźtrait avec les progrĂšs des sciences de la nature. Cependant, il est clair qu'aujourd'hui, le dĂ©veloppement de la connaissance scientifique n'a pas supprimĂ© la pensĂ©e religieuse. N'est-ce qu'une question de temps ou doit-on penser que la religion est un phĂ©nomĂšne plus complexe ou plus Ă©tendu que la reprĂ©sentation que les LumiĂšres s'en faisaient ? 1. PrĂ©supposĂ©s du sujet A. DĂ©marche scientifique et attitude religieuse Les Grecs entendent par science un exercice du raisonnement dont la dĂ©monstration est la plus haute manifestation. La raison procĂšde en suivant des rĂšgles de logique dont la fixitĂ© et l'impersonnalitĂ© tranchent avec l'inconstance des opinions courantes. Le gĂ©omĂštre, le mathĂ©maticien dĂ©couvrent les propriĂ©tĂ©s immuables des figures et des nombres. Ils cherchent la connaissance des choses, alors que les opinions sont des jugements partiels et intĂ©ressĂ©s. La science est de l'ordre de la thĂ©orie, alors que la religion possĂšde dĂšs l'origine une dimension pratique que Durkheim a fortement soulignĂ©e. La religion est un systĂšme solidaire de croyances et de pratiques », distinguant le sacrĂ© du profane et capable d'unir des individus dans une communautĂ© dont ils se sentent les membres. Cette dimension sociale est importante au point que Bergson a pu Ă©crire qu'il n'y a jamais eu de sociĂ©tĂ© sans religion alors que la science et la philosophie n'ont pas toujours existĂ©. Les liens unissant des fidĂšles entre eux, par la mĂ©diation d'un lien commun Ă  une autoritĂ© sacrĂ©e, ont un pouvoir de structuration, ils sont une sorte de ciment social. La religion apparaĂźt donc comme une pensĂ©e globalisante. B. Une question de domaine La diffĂ©rence entre thĂ©orie et pratique ne suffit cependant pas Ă  dire pourquoi la science pourrait faire disparaĂźtre la religion. Envisager ce phĂ©nomĂšne implique que la premiĂšre intervienne de façon offensive sur le terrain oĂč la seconde la prĂ©cĂ©dait. Deux questions se posent alors. Quel est ce domaine ? Quelles sont les caractĂ©ristiques de ces deux modes de pensĂ©e ? La rĂ©ponse Ă  la premiĂšre question nous est donnĂ©e par l'Histoire. Il est indĂ©niable que la science est entrĂ©e en concurrence avec les rĂ©cits religieux touchant la nature, son ordre et ses lois, et qu'elle a pris parfois position dans les dĂ©bats touchant la formation ou l'origine du monde. DĂšs lors, elle prenait une dimension mĂ©taphysique et elle mettait en cause les reprĂ©sentations religieuses, selon lesquelles l'ordre de l'univers ne pourrait venir que de l'action de puissances divines dont l'intelligence est Ă  reconnaĂźtre dans les phĂ©nomĂšnes qui nous entourent et dont la sagesse est Ă  honorer dans des cultes. [Transition] Ce point permet de saisir la racine du conflit dont le sujet fait Ă©tat. 2. Les raisons du conflit A. La sĂ©paration du mythe et de la raison Il est frappant d'apprendre qu'Anaxagore, un grand astronome grec, fut accusĂ© d'athĂ©isme et emprisonnĂ© pour avoir dit que le soleil Ă©tait une pierre brĂ»lante. Cette affirmation ĂŽtait Ă  cet astre son caractĂšre sacrĂ© et l'intĂ©grait dans l'univers matĂ©riel oĂč les hommes vivent quotidiennement. L'attitude scientifique se marque par la volontĂ© de dĂ©couvrir la vraie nature et les vraies causes des phĂ©nomĂšnes. Le dĂ©veloppement du discours rationnel s'est fait en critiquant les rĂ©cits religieux, c'est-Ă -dire les mythes. Le mythe est une narration touchant la naissance et le dĂ©veloppement de l'ordre qui gouverne l'univers. Ses histoires mettent en jeu des divinitĂ©s qui s'affrontent et accomplissent des exploits dans une dramaturgie dont le but est de cĂ©lĂ©brer la victoire de l'ordre sur les puissances de confusion. Or, les premiers physiciens prĂ©sentent une pensĂ©e du cosmos en rupture avec cette façon de procĂ©der. La science raisonne Ă  partir de qualitĂ©s abstraites comme le froid », le chaud », le sec », l'humide », et remplace les pĂ©ripĂ©ties guerriĂšres par des rapports mathĂ©matiques de proportionnalitĂ©. L'ordre est le rĂ©sultat de relations Ă©quilibrĂ©es entre des couples d'opposĂ©s. DĂšs lors, le mythe devient synonyme de fable, donc de rĂ©cit mensonger et absurde. B. La dĂ©nonciation de la superstition religieuse Ce premier coup portĂ© aux prĂ©tentions explicatives de la religion ouvre la voie Ă  sa dĂ©finition comme une superstition. Spinoza considĂšre que les cultes sont l'aboutissement de deux illusions qui s'enchaĂźnent. L'ignorance native des hommes les pousse Ă  imaginer ĂȘtre le centre de rĂ©fĂ©rence de la nature. La conscience de poursuivre des buts nous fait croire que tout ce qui nous entoure fait de mĂȘme et, comme nous savons que nous ne sommes pas les auteurs des choses naturelles, nous croyons qu'elles ont Ă©tĂ© créées par des directeurs de la nature » et nous leur rendons des hommages afin qu'ils nous soient favorables. À l'anthropocentrisme s'ajoute l'anthropomorphisme qui projette la forme et les passions humaines sur l'ensemble des phĂ©nomĂšnes. Cette illusion s'explique par l'ignorance et par le dĂ©sir de pouvoir agir sur notre milieu. La personnification des Ă©lĂ©ments naturels rend possible l'Ă©tablissement d'une relation entre eux et nous. Spinoza trace ainsi le portrait de l'homme superstitieux, ignorant et angoissĂ©, qui croit aux prĂ©sages et honore des puissances supĂ©rieures pour satisfaire ses intĂ©rĂȘts. La science, en revanche, Ă©carte l'idĂ©e des causes finales. Elle cherche Ă  rĂ©pondre Ă  la question du comment » et considĂšre la nature comme un objet Ă  Ă©tudier par le calcul et l'expĂ©rimentation. Max Weber parle de dĂ©senchantement du monde » pour qualifier l'action de la raison scientifique Ă  travers le temps. Les phĂ©nomĂšnes s'expliquent par des lois et sans rĂ©fĂ©rence Ă  nos dĂ©sirs. À l'image d'un monde centrĂ© sur l'homme, image de Dieu », la science physique substitue le concept d'un univers indiffĂ©rent Ă  nos souhaits et Ă  nos craintes. Quant aux sciences naturelles, elles Ă©tudient l'histoire de notre espĂšce et la structure de son organisme sans y voir l'intention d'une intelligence supĂ©rieure. [Transition] L'idĂ©e du dĂ©senchantement exprime bien le fait que les sciences ont fait reculer la religion, mais cela suffit-il Ă  penser que leur progrĂšs conduirait Ă  la faire disparaĂźtre ? 3. Les limites de la science A. La tentation scientiste La connaissance de la nature est devenue le domaine des sciences expĂ©rimentales, qui ne se bornent pas Ă  dĂ©crire le rĂ©el mais l'interrogent en construisant des expĂ©rimentations de plus en plus prĂ©cises, contrĂŽlĂ©es et rendues possibles par un appareillage technique dont la sophistication ne cesse de croĂźtre. Le quantifiable, le reproductible sont les valeurs maĂźtresses de ces dĂ©marches. Aux rĂ©cits gĂ©nĂ©raux et symboliques, la science substitue la recherche de laboratoire oĂč la thĂ©orie rend possible le dĂ©veloppement de mesures pointues et leur expression dans une forme symbolique abstraite comme une Ă©quation. Une expĂ©rimentation n'est pas une simple observation de faits mais prĂ©suppose l'admission de plusieurs thĂ©ories et la maĂźtrise d'un appareillage complexe. Ces avancĂ©es ont pu faire croire que la science gouvernerait la totalitĂ© des affaires humaines. Le positivisme d'Auguste Comte en donne une expression trĂšs nette. Comte Ă©labore la loi des trois Ă©tats qui dĂ©finit la pĂ©riode scientifique comme l'achĂšvement de deux Ăąges antĂ©rieurs et imparfaits. Ainsi, l'humanitĂ© a commencĂ© par une pĂ©riode thĂ©ologique, dans laquelle l'ignorance des hommes les conduisit Ă  croire en l'action de causes surnaturelles et cachĂ©es. Puis vint l'Ă©poque mĂ©taphysique, qui rationalisa ces fictions en parlant de causes premiĂšres et finales mais resta dans les erreurs de l'abstraction. Enfin, l'Ăąge scientifique ou positif » se libĂšre de ces illusions pour n'Ă©tudier que les lois gouvernant les phĂ©nomĂšnes, avec un esprit animĂ© par le souci de la certitude et de la prĂ©cision. Comte parle d'un progrĂšs qui Ă©limine les croyances dans une ou plusieurs divinitĂ©s. La science dĂ©gage les lois de tous les phĂ©nomĂšnes pour ĂȘtre la pensĂ©e universelle. On nomme cette prĂ©tention le scientisme. B. Les deux ordres On note toutefois que si la religion a quittĂ© le terrain de la connaissance de la nature elle n'a pas disparu. Notre Ă©poque est mĂȘme marquĂ©e par un retour du religieux. N'est-ce pas en raison de sa capacitĂ© Ă  prendre en charge des angoisses auxquelles les sciences n'ont rien Ă  dire ? Freud considĂšre la religion comme une illusion, mais il reconnaĂźt qu'elle rĂ©alise les dĂ©sirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l'humanitĂ©. » La dĂ©tresse infantile suscite le dĂ©sir de protection, la crainte de la mort et l'expĂ©rience des souffrances de la vie sont la cause d'un dĂ©sir puissant de justice et de sens. L'absence de preuves ne nuit pas Ă  la religion, elle prend sa source dans des sentiments liĂ©s Ă  notre condition, non dans des dĂ©monstrations ou des expĂ©rimentations Ă©laborĂ©es. Freud soutient que cette illusion ne peut dĂ©cliner que si notre dieu le logos » arrive Ă  montrer Ă  l'humanitĂ© qu'elle doit s'organiser par elle-mĂȘme. Il nomme cela l'Ă©ducation en vue de la rĂ©alitĂ© » et fait valoir l'extrĂȘme jeunesse de la pensĂ©e scientifique pour fonder sa croyance dans une disparition possible du phĂ©nomĂšne religieux. On peut toutefois se demander si Freud ne confond pas deux registres. La foi est une certitude subjective, issue d'une adhĂ©sion Ă  un appel intĂ©rieurement ressenti. C'est une donation de sens qui se reçoit avant toute critique, quand la science cherche l'objectivitĂ© Ă  travers la mise en place de procĂ©dures contrĂŽlĂ©es. Il y a, comme le dit Pascal, deux ordres c'est le cƓur qui sent Dieu et non la raison. VoilĂ  ce qu'est la foi Dieu sensible au cƓur, non Ă  la raison. » Les valeurs morales, l'interrogation sur la condition temporelle de l'homme, ne sont pas du ressort scientifique. La mort est pour le naturaliste un phĂ©nomĂšne naturel et nĂ©cessaire, mais elle est pour chacun de nous une douleur quand nous perdons un proche. DĂšs lors comment la penser ? Est-ce un terme, un passage ? La libertĂ© de la conscience est ici en jeu et elle est porteuse d'un droit qui n'est pas justiciable d'une approche scientifique. Conclusion Il est incontestable que les avancĂ©es multiples de la science dans le domaine de la connaissance de la nature ont fait reculer les rĂ©cits religieux en les rabaissant au rang de mythes. Aujourd'hui, la religion ne cherche plus guĂšre Ă  rivaliser sur ce terrain, mĂȘme si certains croyants rejettent encore Darwin. Elle reste toutefois prĂ©sente sur les questions de choix moraux et constitue pour certains une rĂ©ponse face Ă  leur demande de sens. La spĂ©cificitĂ© de l'expĂ©rience de la foi la situe sur un autre plan que celui des expĂ©rimentations scientifiques, ce qui devrait empĂȘcher les empiĂ©tements rĂ©ciproques. La philo en atelier mercredi 7 fĂ©vrier 2018 Ă  19h30 Ă  l’Atelier Janusz Korczak Regarder le monde et essayer de le comprendre, questionner l’implicite des connaissances scientifiques ou non, s’interroger sur notre rapport au monde et aux autres constituent des questionnements propices Ă  la rĂ©flexion. La dĂ©marche de l’intervenant, Thomas Adam Garnung, diplĂŽmĂ© de philosophie, d’arts plastiques, metteur en scĂšne et professeur de théùtre, consiste Ă  favoriser la participation et le cheminement personnel par l’échange et le dĂ©bat dans le prolongement des NNP, nouvelles pratiques de la philosophie. L’homme peut-il se passer de religion ? DĂ©couvrant des restes d’hominidĂ©s, les archĂ©ologues s’échinent Ă  dĂ©terminer s’il y a eu rite funĂ©raire ou non, montrant par lĂ -mĂȘme que, selon eux, la religion serait-ce qui distingue l’homme de l’animal. Mais est-ce bien elle qui fait l’homme ou l’homme qui fait la religion ? N’est-ce pas parce que nous devenons des hommes que nous nous mettons Ă  inventer des rĂȘves ? [Introduction] [Accroche ] Les plus grandes religions survivent aux gĂ©nĂ©rations, elles permettent aux sociĂ©tĂ©s de se donner des fondements, une tradition, Ă  travers le temps. Dans ces sociĂ©tĂ©s, et mĂȘme si les hommes n’en ont pas toujours conscience, les religions dirigent en partie leurs pratiques et reprĂ©sentations. A considĂ©rer la sociĂ©tĂ© actuelle, toutefois, il est difficile de ne pas constater un affaiblissement de la religion. En effet, un Etat laĂŻc permet une libertĂ© de croyance, qu’on ne songe guĂšre Ă  remettre en cause ; l’athĂ©isme, en tant nĂ©gation de l’existence de Dieu, est aujourd’hui habituel. S’agit-il d’un Ă©tat d’exception ou d’une tendance irrĂ©versible ? [Annonce et reformulation du sujet ] Peut-on se passer de religion ? L’homme, considĂ©rĂ© individuellement ou socialement, peut-il vraiment vivre sans rites et sans dogmes ? [problĂ©matique ] Est-il concevable de se dispenser des pratiques et croyances qui ont occupĂ© l’humanitĂ© depuis son origine ? Est-ce mĂȘme souhaitable si l’on parvient Ă  se dispenser de toute religion, peut-on vivre de maniĂšre tout Ă  fait humaine ? Il est difficile de voir clair dans ces questions, tant qu’on n’a pas suffisamment bien compris pourquoi la religion peut, d’une part, ĂȘtre rejetĂ©e par l’homme, alors que, d’autre part, elle a toujours prĂ©tendu rĂ©pondre Ă  ses aspirations les plus profondes. [Plan ] Pour rĂ©pondre, il faudra d’abord dĂ©gager ce qui permet Ă  l’homme de refuser les croyances propres Ă  la religion. Par la suite, il s’agira de montrer dans quelle mesure la foi est nĂ©cessaire Ă  l’homme, mĂȘme si cette foi est illusoire, et mĂȘme si elle n’est pas tout Ă  fait religieuse. Enfin, nous pourrons dĂ©terminer le rĂŽle moral et social que la religion est amenĂ©e Ă  jouer et si cela peut ĂȘtre vĂ©ritablement indispensable Ă  l’homme. [Enjeu ] Ce sera l’occasion de mieux saisir ce que l’on attend de la religion, ce qu’elle attend de nous, et, par lĂ -mĂȘme, de pouvoir comprendre ce qui peut animer la vie de tant d’hommes, y compris de ceux dont les croyances et les pratiques sont tout Ă  fait Ă©loignĂ©es des nĂŽtres. [I – l’homme peut se passer des croyances religieuses, parce qu’elles sont illusoires] [La religion est devenue une affaire privĂ©e] Quelle est la place des grandes religions dans un pays comme la France ? Depuis 1905, nous distinguons l’Eglise et l’Etat. Il ne s’agit pas d’interdire la religion mais de la restreindre au domaine privĂ© les citoyens peuvent adopter n’importe quelle croyance s’ils le veulent et ont la libertĂ© de culte. Il est aussi possible de ne choisir aucune religion. C’est le cas des personnes qui se considĂšrent athĂ©es ou agnostiques, et qui se passent visiblement de religion. Elles peuvent, Ă©tant athĂ©es, refuser nettement l’existence d’un Dieu, quel qu’il soit, ou tout simplement considĂ©rer, comme les agnostiques, que ce type de question est tout Ă  fait indĂ©cidable et ne mĂ©rite pas vraiment qu’on partage les dogmes d’une Eglise. Quoi qu’il en soit, une personne athĂ©e ou agnostique se dispense des dogmes et des pratiques obligatoires que toute religion comprend. Leur conception de la religion, plus ou moins critique, plus ou moins indiffĂ©rente, est aujourd’hui complĂštement admise. On peut mĂȘme se demander si le refus de la religion n’est pas plus Ă©vident que sa justification. Encore faut-il comprendre en quoi consiste ce refus. [La science remet en cause les croyances religieuses] Comment est-il possible de se dispenser des pratiques et des croyances religieuses ? AprĂšs tout, la grande majoritĂ© des cultures comprennent une religion. Pourquoi, historiquement, l’homme moderne a-t-il dĂ©laissĂ© la religion ? Parmi les nombreuses raisons que l’on peut allĂ©guer, les progrĂšs de la science jouent ici un rĂŽle important. Les croyances religieuses s’appuient en effet sur une croyance impĂ©rative en une rĂ©alitĂ© transcendante, que l’homme ne peut atteindre mĂȘme s’il souhaite toujours s’élever vers elle. En tant que telles, des croyances de ce type ne peuvent ĂȘtre prouvĂ©es. Or, l’homme moderne se fie de plus en plus en la science, qui s’appuie sur l’observation, l’expĂ©rimentation et la raison. La science a produit des dĂ©couvertes qui ont modifiĂ© de fond en comble la maniĂšre qu’avaient les hommes de se reprĂ©senter le monde et l’univers. Les connaissances auxquelles la science a abouti ne concordaient pas toujours avec les dogmes des religions en place. Jusqu’à Copernic et GalilĂ©e, l’idĂ©e selon laquelle la terre est centre de l’univers Ă©tait commune et soutenue par l’Eglise catholique, qui a refusĂ© l’idĂ©e inverse, hĂ©liocentrique, que prouvait pourtant la science. Aujourd’hui, on a tendance Ă  interprĂ©ter les catastrophes naturelles, les tremblements de terre par exemple, beaucoup moins comme des Ă©vĂ©nements surnaturels que comme des consĂ©quences, en partie prĂ©visibles, de causes tout Ă  fait naturelles. C’est pourquoi nous nous tournons plus spontanĂ©ment vers un scientifique que vers un prĂȘtre, quand il s’agit de comprendre le monde naturel et l’univers. [Le rejet de la religion comme illusion] Il est une autre raison qui peut justifier le rejet de la religion. Celle-ci impose des rituels et dogmes Ă  ses fidĂšles, autrement dit elle les contraint Ă  agir et Ă  penser d’une maniĂšre bien dĂ©terminĂ©e. Pour des individus qui appartiennent Ă  une sociĂ©tĂ© qui met en avant la libertĂ© personnelle, ces contraintes apparaissent gĂ©nĂ©ralement insoutenables. L’individu prĂ©fĂšre dĂ©terminer lui-mĂȘme la maniĂšre dont il doit agir et penser. L’athĂ©isme peut alors tout Ă  fait se concevoir non seulement comme le rejet de l’existence de Dieu, mais aussi comme le refus de se conformer, sans rĂ©flexion prĂ©alable, Ă  des pratiques et des reprĂ©sentations qu’il n’a pas choisies. Ce que l’athĂ©e refuse alors, c’est la domination d’une Eglise, et ce qu’il met en avant, c’est sa propre libertĂ© pratique et intellectuelle. Ainsi, quand Marx juge qu’il faut se dĂ©faire de la religion, c’est pour promouvoir la libertĂ© des peuples Ă  se dĂ©terminer eux-mĂȘmes. Il estime en effet que la religion a toujours Ă©tĂ© un outil au service de la domination du peuple par les puissants. Les illusions qu’elle fabrique, dans cet ordre d’idĂ©e, servent Ă  contenir et Ă  dominer la population. Si la religion rĂ©pond bien Ă  un besoin, celui de l’amĂ©lioration des conditions de vie, elle le fait d’une maniĂšre inacceptable, puisqu’elle reporte la rĂ©solution de la misĂšre des hommes en un autre temps et en autre lieu, dont l’existence n’est pas garantie. Si l’on doit souffrir toute une vie pour s’acheter une place au paradis, et que celui-ci n’existe pas, la souffrance a Ă©tĂ© vaine, et apparaĂźt plus odieuse que jamais. C’est pourquoi il apparaĂźt indispensable, pour Marx, de se passer de religion. Mais est-ce seulement possible ? Marx Ă©crit le fondement de la critique irrĂ©ligieuse est c'est l'homme qui fait la religion, ce n'est pas la religion qui fait l'homme. Critique de la philosophie du droit de Hegel La consĂ©quence est directe dans la mesure oĂč c’est l’homme qui fait la religion, il doit pouvoir s’en passer, en trouvant de meilleurs moyens pour rĂ©pondre Ă  sa condition misĂ©rable. Il peut et il doit parvenir Ă  se passer d’une illusion aliĂ©nante, qu’il a lui-mĂȘme forgĂ©e mais par laquelle il s’îte sa propre libertĂ©. [Transition] Le rejet de la religion est le rejet d’une illusion qui est irrationnelle et aliĂ©nante. Pourtant, si la religion est une illusion, c’est une illusion particuliĂšrement solide, qui ne se dissipe pas aussi facilement qu’on peut le penser. Comment comprendre que les hommes ne parviennent pas si facilement Ă  se dĂ©tacher de sa dĂ©pendance ? [II – La foi, illusoire ou non, s’impose nĂ©cessairement Ă  l’homme] [La religion rĂ©pond Ă  un dĂ©sir nĂ©cessaire mĂȘme s’il est illusoire.] On peut interprĂ©ter la religion comme un phĂ©nomĂšne qui s’appuie sur des illusions, c’est-Ă -dire des reprĂ©sentations trompeuses, qui plaisent ou qui font peur, mais qui ne correspondent Ă  rien de rĂ©el. Le problĂšme, c’est que ce type d’illusion, si c’en est, dure depuis si longtemps qu’on doit supposer qu’il doit s’appuyer sur un besoin ou un dĂ©sir fondamental pour l’homme. C’est ce qu’exprime Freud en montrant, dans L’avenir d’une illusion, que la religion ne s’appuie pas sur des erreurs, mais bien sur des illusions, au sens propre. D’un cĂŽtĂ©, il y a l’erreur, que l’on rejette dĂšs qu’on en reconnaĂźt la faussetĂ© si j’ai mal traitĂ© un problĂšme de mathĂ©matiques et que je m’aperçois des erreurs que j’ai faites, je sais qu’il me faudra Ă©viter de les reproduire. De l’autre cĂŽtĂ©, il y a l’illusion, qui peut bien apparaĂźtre fausse, mais qu’on ne parvient pas Ă  rejeter pour autant. L’illusion, en effet, rĂ©pond Ă  des dĂ©sirs qui sont si puissants qu’ils ne nĂ©cessitent pas vraiment la confirmation de la rĂ©alitĂ©. Ainsi, la jeune femme qui a rĂȘvĂ©, autrefois, Ă©tant petite fille, qu’elle rencontrerait le prince charmant sait bien que celui-ci n’existe pas, mais son comportement, ses attentes et, au bout du compte, ses dĂ©sirs, seront dirigĂ©s par l’espoir de la rencontre avec un tel ĂȘtre. Pour Freud, il se passe un phĂ©nomĂšne similaire pour la croyance religieuse le croyant n’a pas besoin d’avoir la preuve que ses croyances sont vraies, parce qu’elles ne reposent pas, avant tout, sur leur rapport Ă  la rĂ©alitĂ©, mais sur des dĂ©sirs. Pour Freud, la croyance en un Dieu tout-puissant, par exemple, repose sur le dĂ©sir d’ĂȘtre protĂ©gĂ© que le pĂšre ne peut plus satisfaire. Comme la figure paternelle s’avĂšre moins forte, moins apte Ă  nous protĂ©ger, et comme on a toujours besoin d’une protection, nous projetons nos dĂ©sirs vers un ĂȘtre qui joue au fond le mĂȘme rĂŽle Dieu. [L’authentique foi en Dieu s’impose Ă  l’homme] On peut certes se rassurer en croyant qu’il existe un ĂȘtre qui veille Ă  notre Ăąme, mais Dieu est plus que cela. Dieu protĂšge, rassure, mais il provoque aussi en nous la conscience de nos propres fautes, de nos bassesse, voire de notre misĂšre. Plus profondĂ©ment, il faut se demander si Dieu est un ĂȘtre qui rĂ©pond vĂ©ritablement Ă  nos dĂ©sirs et Ă  nos besoins. Plus gĂ©nĂ©ralement, la foi, en gĂ©nĂ©ral, est peut-ĂȘtre bien plus que la rĂ©ponse Ă  un dĂ©sir personnel. Elle concerne certes la personne elle-mĂȘme, puisque toute foi implique un engagement de celui ou celle qui a la foi . Pour autant, elle ne vient pas de la personne, mais lui est plutĂŽt imposĂ©e. On peut considĂ©rer, Ă©tant croyant, qu’elle ne dĂ©pend pas tant de l’homme lui-mĂȘme, de ses besoins ou de ses dĂ©sirs, que d’une nĂ©cessitĂ© qui le transcende, qui dĂ©passe ses capacitĂ©s et qui conditionne sa vie. C’est cette idĂ©e que dĂ©fend Pascal quand il montre, dans les PensĂ©es, que le Dieu en lequel il croĂźt n’est pas d’abord un Dieu de la providence qui vient rĂ©pondre aux exigences humaines. C’est plutĂŽt un Dieu d’amour et de consolation qui fait sentir aux hommes leur misĂšre intĂ©rieure tout en remplissant leur Ăąme de joie , de confiance ou d’ amour . Dieu ne dĂ©pend pas des hommes, eux dĂ©pendent de Lui c’est ainsi qu’il faut comprendre Ă  la fois leur misĂšre et le fait qu’ils aient Ă  se tourner vers Lui. La foi, comprise ainsi, n’est pas tant une rĂ©ponse aux soucis de l’existence qu’un don, dont il faut, mĂȘme si c’est difficile, se rendre capable. Difficile de savoir si la foi est une rĂ©ponse Ă  un dĂ©sir inconscient de l’homme, comme le prĂ©tend Freud, ou si elle est un don de Dieu, comme le montre Pascal. On peut considĂ©rer, en suivant Pascal, que la foi est plus qu’une rĂ©ponse c’est un engagement qui porte l’homme Ă  s’élever. [L’homme ne peut se passer de foi] Cette conception de la foi a le mĂ©rite de rendre compte de la puissance des engagements religieux, qui peuvent pousser jusqu’au don de soi et au sacrifice. Par ailleurs, elle permet aussi de penser pourquoi il existe des hommes qui se passent trĂšs bien de religion. Si Pascal n’entreprend pas de convaincre des athĂ©es convaincus par la raison PensĂ©es, c’est bien qu’il sait que la foi est reçue et imposĂ©e et qu’elle ne peut ĂȘtre l’objet d’une dĂ©libĂ©ration collective ou personnelle. On peut donc, aussi bien, ne pas avoir reçu la foi et, du coup, se passer de religion. Mais il faut certainement d’autres types de foi. Si l’on se tourne vers Freud, pour celui qui ne croĂźt pas ou plus dans les prĂ©ceptes religieux et qui a l’angoisse de ne plus ĂȘtre protĂ©gĂ©, il y a d’autres solutions la psychanalyse en est une. Le militant marxiste a foi dans le prolĂ©tariat et la rĂ©volution, il se porte vers un avenir meilleur qu’il ne connaĂźt pas encore. Le pĂšre ou la mĂšre ont foi en leur enfant, ils s’engagent envers lui de maniĂšre inconditionnelle ils l’aiment, mĂȘme s’il peut ne pas ĂȘtre et agir comme ils s’y attendaient. Enfin, on peut dire que l’individu rationnel a foi en ses propres capacitĂ©s pour distinguer le vrai du faux. La science elle-mĂȘme repose sur une conviction, suivant laquelle le monde est explicable, mĂȘme s’il ne l’est jamais tout Ă  fait complĂštement. [Transition] Il est humain d’avoir la foi l’homme, qu’il soit croyant ou non, est portĂ© Ă  engager son existence sans jouir d’une pleine certitude dans la rĂ©alisation de ses dĂ©sirs et de ses espoirs. Mais est-ce de religion dont il a besoin pour exercer cette foi ? [III – L’homme ne peut se passer de la fonction morale et sociale de la religion] [la foi est un engagement moral] La foi n’implique pas seulement une croyance absolue mais une maniĂšre d’agir qui est rĂ©solue, dĂ©terminĂ©e, inconditionnelle. Celui qui a la foi dans les principes de sa religion est censĂ© toujours agir dans le mĂȘme sens, dans la mĂȘme direction. Certes, il se posera des questions sur la maniĂšre dont il doit agir concrĂštement, mais il n’aura aucun doute sur les principes fondamentaux qui guident son action. Autrement dit, sa foi n’est plus seulement une forte croyance, c’est un engagement, et un engagement moral, dans la mesure oĂč il va agir en se rapportant Ă  ses semblables. Ainsi le fidĂšle croit-il en un certain type de rĂ©alitĂ© qu’il ne peut prouver mais, surtout, il est animĂ© par une morale, Ă  savoir un ensemble d’obligations envers lui-mĂȘme et envers les autres, des obligations auxquelles sa religion le rappelle en permanence. Pour Spinoza, le but de la philosophie est la vĂ©ritĂ©, celui de la foi est l’obĂ©issance et la pitiĂ© TraitĂ© thĂ©ologico-politique. Il ne s’agit pas pour Spinoza de dĂ©valoriser la religion ou de montrer qu’elle nie la libertĂ© des hommes il entend montrer que la foi est avant tout morale. En effet, elle permet de savoir Ă  quoi et Ă  quoi il faut obĂ©ir et de diriger l’action des hommes vers la pitiĂ©, c’est-Ă -dire l’aide du prochain. Et son but n’est pas la vĂ©ritĂ©, c’est-Ă -dire la juste connaissance thĂ©orique. Du coup, la question de savoir si la religion est illusoire ou non est secondaire. Ce qui importe, c’est que la religion conduise Ă  une morale qui soit estimable. [La religion a la morale pour raison d’ĂȘtre] Si l’on suit l’une de ses Ă©tymologies possibles, la religion est une mise en relation. Que met-elle en relation ? D’abord elle relie les hommes Ă  des rĂ©alitĂ©s qui les dĂ©passent. Ce que recherche un chrĂ©tien, quand il va Ă  l’église, en principe, ce n’est pas seulement de satisfaire aux contraintes sociales. Il sait que le lieu a Ă©tĂ© construit pour permettre ou, tout du moins, symboliser une certaine Ă©lĂ©vation de lui-mĂȘme, vers un au-delĂ . Ensuite, la religion relie les hommes entre eux. L’église, cette fois-ci, est un lien oĂč les hommes se rassemblent et deviennent une communautĂ© de fidĂšles. C’est en ce sens que Durkheim dĂ©finit la religion, qui est pour lui un systĂšme solidaire de croyances et de pratiques relatives Ă  des choses sacrĂ©es, c’est-Ă -dire sĂ©parĂ©es, interdites, croyances et pratiques qui unissent en une mĂȘme communautĂ© morale, appelĂ©e Eglise, tous ceux qui y adhĂšrent Les formes Ă©lĂ©mentaires de la vie religieuse. Si c’est une communautĂ© morale , c’est qu’elle permet Ă  ses membres d’agir ensemble, mais aussi, et surtout, d’agir Ă  partir de principes de vie, de devoirs, d’une certaine idĂ©e du Bien, Ă  partir desquels ils se rapportent les uns aux autres. Pour Durkheim, c’est la fonction religieuse premiĂšre donner une assise, un fondement, Ă  la moralitĂ© humaine. Tant que l’homme a besoin de morale, il a besoin de religion. [Notre sociĂ©tĂ© est encore morale et religieuse] Reste Ă  savoir si nous vivons dans des sociĂ©tĂ©s qui, de ce point de vue, sont encore religieuses. On entend souvent dire que nous vivons une Ă©poque oĂč les individus n’ont plus de repĂšres , de valeurs , bref plus de morale. GĂ©nĂ©ralement, on estime justement qu’une des causes de cet affaiblissement de la morale tient Ă  la place trop rĂ©duite qu’auraient les religions traditionnelles dans nos sociĂ©tĂ©s occidentales modernes. Ce jugement est certainement trop hĂątif, entre autres choses parce que nos sociĂ©tĂ©s, mĂȘme si elles sont individualistes et si elles se prĂ©tendent plus rationnelles que les autres, ne sont pas moins morales. C’est la thĂšse que dĂ©fend Durkheim en montrant que c’est la personne individuelle qui, dans nos sociĂ©tĂ©s, est devenue sacrĂ©e elle est comme environnĂ©e d’une aurĂ©ole de saintetĂ© Sociologie et philosophie. C’est notamment Ă  partir du respect de l’individu que, dans nos sociĂ©tĂ©s, nous constituons alors une morale. On pourrait aussi montrer que des sociĂ©tĂ©s qui se prĂ©tendent sans religion, comme la sociĂ©tĂ© soviĂ©tique, ne pouvait exister sans un culte de l’Etat et sans une morale de l’effort collectif. Ainsi, il est difficile de concevoir une sociĂ©tĂ© oĂč les individus ne s’engagent pas les uns les autres, et les uns envers les autres, Ă  partir de principes inconditionnels, autrement dit d’une foi commune. C’est de cette religiositĂ©, prĂ©cisĂ©ment, dont les hommes ne peuvent se passer. [Conclusion] L’athĂ©isme est un fait il est possible de se passer de l’idĂ©e de Dieu pour vivre, parce qu’il ne rĂ©pond Ă  aucune raison et on peut n’en avoir aucune expĂ©rience ; on peut alors considĂ©rer la croyance en Dieu, et toute croyance religieuse, comme illusoire. Plus encore, si l’on se passe de religion, c’est que l’on estime que, par ses illusions, elle aliĂšne la libertĂ© des individus et des peuples. Toutefois, il y a un Ă©lĂ©ment fondamental de la religion dont les hommes ne peuvent se dispenser c’est la foi, c’est-Ă -dire un engagement inconditionnel envers certains ĂȘtres ou principes. Or, cette foi n’a de sens que si elle s’inscrit dans une morale commune et, si l’on comprend la religion comme cette foi commune, il est clair que l’homme ne peut s’en passer, tant qu’il est un individu social. On peut bien sĂ»r objecter que le sentiment d’appartenir Ă  une sociĂ©tĂ© s’est affaibli. Peut-ĂȘtre l’individu contemporain est-il devenu indiffĂ©rent Ă  toutes choses, Ă  tel point qu’il n’a plus foi en rien. Ce serait un constat amer, mais aussi passablement injuste. Tant qu’il agit en relation avec d’autres hommes et tat qu’il dirige sa vie Ă  partir de principes qu’il peut partager, et qui apparaissent sacrĂ©s, l’homme est encore, d’une certaine maniĂšre, un ĂȘtre religieux. Et mĂȘme si ces principes ont changĂ©, s’ils sont diffĂ©rents d’un individu Ă  l’autre, d’une sociĂ©tĂ© Ă  l’autre, il faut les comprendre comme un signe d’une commune humanitĂ©. Français Commentaires Philosophie Dissertations Commentaires

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